Le processus naturel

Jigmé Rinpoché

La méditation est un processus naturel. Il n’y a pas à ruser ou à forcer l’esprit. Il suffit de le laisser dans son état naturel, avec une grande lucidité. Et il ne faut surtout pas être en attente d’un résultat immédiat. Les fruits ne mûriront qu’avec le temps. Simplement, soyons naturels et vivons la situation telle qu’elle est dans le moment. Et bien qu’au début nous ne connaissions qu’un bref instant de perception claire, elle nous apporte tout de même une certitude quant à la clarté de notre esprit. Cette certitude nous encourage et nous donne envie de méditer davantage.

La méditation n’est pas une tâche spéciale à effectuer dans un certain délai. Par exemple : je bêche le jardin, je sème les graines, j’ai fini le travail: mission accomplie. Ou bien : je fais bâtir une maison. La construction achevée, je me réjouis. Bravo, le but est atteint. C’est terminé ! Ou bien : je fais des études de médecine, j’obtiens le diplôme et j’exerce mes fonctions. Non, il n’en est pas ainsi. En méditant, nous n’obtiendrons rien de directement utilisable. Pourtant, à coup sûr il y aura des fruits. Le développement que nous avons entrepris nous conduira jusqu’à l’éveil.

Entendre parler de la méditation comme d’un processus naturel soulève d’apparentes contradictions. Dans le bouddhisme, on nous demande d’être satisfaits de notre vie et de poursuivre notre développement, de n’avoir aucune attente de résultat et de persévérer jusqu’à l’éveil. Méditer, c’est un peu comme se nourrir. Il est naturel de manger tous les jours. On ne mange pas une fois pour toutes car, jusqu’à la mort, on a besoin de nourrir son corps. Souvent, au début, lorsqu’on reçoit les premières instructions de méditation, on est plein d’entrain, plein de courage, mais aussi plein d’attentes. Et puis, on médite, on médite, et rien ne vient. Alors, on se décourage, on se dit : « Finalement, ce n’est pas pour moi », et on arrête de pratiquer. Ou bien, en pratiquant, de petites expériences s’élèvent. On est alors fasciné par ces expériences, elles deviennent une nouvelle préoccupation pour l’esprit et cette saisie empêche de progresser. Dans la méditation, il faut constamment approfondir jusqu’à ce qu’on arrive au but, et, en même temps, il ne faut pas avoir d’attentes. C’est ainsi, même si cela semble contradictoire.